Quête : un trésor enfoui...

Arasi était allongée sur son lit, elle se sentait étrangement fatiguée.
Elle lança un regard vers la fenêtre et observa le ciel si sombre.
Les étoiles brillaient fort, un instant, elle crut voir quelque chose bouger dans les jardins mais il faisait trop sombre pour réaliser de quoi il s’agissait.
Arasi ferma ses yeux et tenta de trouver le sommeil.
Une heure, deux heures, rien à faire, elle avait beau tourner dans tous les sens, elle n’arrivait pas à s’endormir.
Elle se redressa et alluma une bougie sur son chevet.
La lueur lui fit voir son reflet dans une glace.
Arasi était fort pâle, presque malade.
Ne trouvant toujours pas le sommeil, elle se rendit dans sa bibliothèque et entrouvrit un vieux livre que son père lisait souvent autrefois.
Il s’agissait de l’histoire d'un homme perdu dans un monde qu’il ne connaissait pas et qui devait se défendre contre de nombreux étrangers lui voulant du mal.
Bref, Arasi s’installa sur un fauteuil en cuir et se recouvrit dans une couverture de laine avant de lire son lire préféré.
Au sixième chapitre, Arasi remarqua que quelque chose de particulier était coincé derrière la couverture du livre.
De ses fins petits doigts, elle retira la feuille dérangeante et la déplia.
Il s’agissait d’une carte, oui... De la poussière la recouvrait. Arasi souffla dessus afin de découvrir ce que renfermait la carte… Il s’agissait plutôt d’une lettre.

« Lyse,
Depuis longtemps déjà, je voulais t’offrir un présent de grande valeur mais jusqu’alors, je n’en ai pas eu l’occasion. Maintenant que la vie me paralyse, que la mort m’entraîne peu à peu, il est de mon devoir de te révéler l’endroit où j’ai caché le secret de notre famille.
« L’olivier te donnera la clef ».
Tendrement,
Léonard ».

Arasi se retint de pousser un cri strident. Léonard était d’après ce que sa mère lui en avait dit, le quatrième roi d’Im. Son arrière-arrière-arrière grand-père.
De quoi s’agissait-il, de quel secret parlait-il ?
Arasi n’en avait aucune idée, précipitamment, elle enfila de petits souliers et une robe de chambre puis s’enfuie dans les couloirs humides du château. Elle parcouru une centaine de mètres avant de toquer à la porte d’Arceus.

-J’ai quelque chose d’important à vous monter ! Ouvrez.

Consciente qu’il était déjà très tard, Arasi n’insista pas et se détourna de la porte pour refaire le chemin inverse.
* Arceus aurait pu m’aider, il est perspicace, qui mieux que lui aurait pu me conseiller ?*

Après les événements scabreux de la soirée, auxquels il n'était pas du tout étranger, Arceus avait poliment accepté la proposition de loger au château royal. La chambre qu'il avait eu à occuper était de taille conventionnelle, avec un lit, une armoire en bois massif, une commode immense et une large table au centre. L'homme se trouvait dans son lit, mais ne cherchait pas le sommeil, il repensait aux événements de la réception, tandis qu'un filet d'air venait rafraîchir la pièce par la fenêtre entrouverte.

Perdus dans des dédales rhétoriques avec lui-même, le temps lui échappait il lorsque l'on frappa à la porte, il était déjà tard dans la nuit.
Se levant assez vite, le temps de réactiver ses muscles, il enfila sa cape en sous-vêtements et ouvrit à la personne.

Arasi... Que se passe-t-il ?

Il avait reconnu sa voix... A travers l'épaisseur de la porte et en ne se concentrant pas, il n'était pas sûr, mais ne fut pas vraiment surpris. Visiblement, la reine, elle, n'avait pas pris pas précaution d'enfiler beaucoup plus que ce qu'elle portait lorsqu'elle dormait. L'ambassadeur fit celui qui ne vit rien, alors que déjà elle s'éloignait dans le couloir.
Il la rejoignit assez facilement.

Me voilà. Rajouta-t-il simplement.

Elle ne prit pas le peine de le saluer, et lui montra directement la lettre.
Elle savait que cela n’avait aucun intérêt pour lui, mais pour elle, cela méritait de chercher quelques peu.

Arceus, il faut que je vous raconte un peu l’histoire de ce château, je n’en sais pas grand-chose mais plusieurs secrets le hantent.
Léonard, l’auteur de la lettre est l’un de mes ancêtres, un roi d’Im fort respecté. Il a beaucoup combattu. Il était marié à une femme prénommée Iseut, ils ont eu un fils…
Enfin, de ce que je sais de la légende, Léonard n’aimait pas Iseut, il avait eu une relation secrète avec une dame de la basse classe sociale…
Bref, de cette relation, Léonard aurait eu une fille, Lyse…
Je ne comprends pas tout ce que cela signifie, mais je n’ai pas sommeil et l’histoire me parait intéressante… J’aimerais connaître ce secret… Voulez-vous m’accompagner ?
Seule, je n’irai pas bien loin.

Arasi noua ses cheveux en un chignon, rabaissa sa robe qui laissait entrevoir ses chevilles puis, implora Arceus du regard.
Elle voulait connaître un peu plus de son passé.
Elle attendit qu’il eut fini de lire la lettre puis, se munit d’une torche pour éclairer l’obsucrité de la nuit.

Après l'explication d'Arasi, l'homme lut la lettre qu'elle lui présenta.
Il réfléchit quelques instants, et lui fit part de ses hypothèses.

Les oliviers sont les arbres les plus vieux, en moyenne. Il est possible qu'un des oliviers du parc soit de son époque, de votre Léonard, et que le secret ou un élément en rapport y soit caché. Personne ne penserait à fouiller spontanément un arbre, surtout si celui-ci a poussé pour enfouir ce qu'il cache sous son bois... Allons voir les oliviers ?

C'était tout ce qu'il pouvait déduire, et encore, il ne connaissait pas du tout l'histoire royale du pays... Peut-être que l'olivier était absent de la propriété, même ?
De toute façon, on verrait bien. Il attendit un signal de la souveraine.

Arasi entraîna Arceus dans les couloirs, elle se précipita dans les escaliers, puis, elle se dirigea vers un mur où trônait royalement une tapisserie.

Suivez-moi, murmura-t-elle à Arceus.

Elle appuya sur une pierre qui émit un léger déclic, et le mur s’ouvrit, laissant choir un passage qui n’avait plus été ouvert depuis quelques années.
Arasi sentait son cœur battre très fort dans sa poitrine.
Elle s’avança et traça son chemin.
Bientôt elle arriva au bout du tunnel, tourna la poignée d’une porte et en un clignement d’yeux, la jeune femme se retrouva dans les jardins du château.
Il faisait froid, le sol était humide car il pleuvait. Elle entraîna Arceus dans sa marche et se dirigea vers les arbres du jardin.

Seriez-vous capable de reconnaître l’olivier ?
Il fait extrêmement sombre n’est-ce pas ?

Arasi lui tendit sa torche et guetta les environs.
Il n’y avait personne ici, tout le monde devait dormir depuis bien des heures déjà.
Arasi réfléchissait. Lyse avait donc existée… Qu’avait dit sa mère au sujet de Lyse ?
Elle ne s’en rappelait plus vraiment.
Lyse était née d’un adultère… Elle avait vécue secrètement au château ?
Ou bien avait-elle été tuée dès la naissance ?

*Non, quel intérêt de cette lettre dans ce cas ?*

Une fois sortis de ce passage obscur, ils débouchèrent dans le parc, enchanteur, même de nuit. Il prit le flambeau des mains de son équipière, tandis qu'ils venaient de s'arrêter devant une zone parsemée d'arbres, faiblement éclairés par la lune, et par la flamme vacillante sous l'intense battue des gouttes nocturnes.

Quel pouvait bien être le secret caché dans un arbre ? Une lettre, une carte, un bijou, un autre objet ? Il ne saurait dire. Mais tout cela lui rappelait le temps où il explorait les temples anciens. Cette course au mystère, la nuit, le flambeau, tout devenait épique en quelques instants.

Après une étude rapide des parties visibles des arbres, il s'approcha plus particulièrement d'un petit arbre massif. La silouhette caractéristique de l'olivier. Il passa sa main dessus et eut la confirmation, seul ce genre d'espèce possédait une telle écorce. Il s'écria en direction d'Arasi.

Venez, j'ai trouvé un olivier ! Il a l'air d'être suffisament âgé !

Arasi fut guidée par les sons de la voix d’Arceus.
Il n’était qu’à quelques mètres d’elle.
Doucement, elle caressa l’arbre.

*Comment savoir s’il s’agit de celui-ci, et quelle est donc cette clef ; je ne comprends pas*

Arasi parcourut l’arbre du regard… Oui, il semblait fort ancien mais peut-être pas autant que ce qu’elle pensait.

Comment savoir si celui-ci est le bon ?

Arasi réfléchit quelques instants et relut la lettre.

Arceus, Lyse est née d’un adultère, pourquoi aurait-elle été destinée à connaître un secret de famille. Elle n’était pas de notre famille, enfin, à moitié.
Pourquoi ? Je ne sais pas grand-chose.

Arasi essaya de se rappeler…
Loweleï aurait pu l’aider mais elle n’était pas là ce soir.
Il aurait peut-être mieux valu la joindre au voyage.

Arasi frotta la terre autour de l’olivier à la recherche du moindre indice mais il n’y avait rien.
Elle continua désespérément à chercher mais c’était sans espoir…

L'arbre était normal, en tout point... C'est que le temps avait effacé ses traces, si c'était bien celui-ci ! Il n'avait pas le souvenir d'autres oliviers que celui-ci, après tout, donc ou ce n'était pas d'un arbre qu'il s'agissait, ou ils cherchaient mal. Le secret n'était pas là où Arasi avait regardé, en surface, donc, était-il... dedans ?

Je suis désolé, je ne connais pas l'histoire de votre lignée... Il y a bien un moyen de savoir, mais il faudrait que je me rende à la salle de diplomatie du château pour être fixé. Si mes souvenirs sont bons, Im a accepté il y a quelques années maintenant de s'équiper du dispositif de communication longue distance pour les relations au sommet, peut-être que le passage qui vous intéresse se trouve dans les ouvrages de la grande bibliothèque continentale des gouvernements ? Vous qui êtes reine, avez dû en entendre parler.
Mais quoi qu'il en soit, j'ai un moyen rapide de vérifier cet arbre, si vous permettez...

Demanda-t-il, pendant qu'il lui faisait signe de reculer. Il sortit ensuite son épée, prise en même temps que la cape, dans laquelle elle se trouvait en fait, la déploya et donna un estoc foudroyant dans le tronc. Il ressortit l'arme. Rien. Il recommença deux ou trois fois, jusqu'à ce que son épée soit arrêtée à mi-chemin par un obstacle dur, dans le tronc.

Arasi, je sens quelque chose !

S'écria-t-il, émoustillé par l'aventure.

Arasi était émerveillée…
Elle n’avait pas eu le temps de répondre à Arceus qui s’était empressé de déformer l’olivier.
Arasi resta en arrière et croisa le regard d’Arceus :
Continuez, dit-elle.Elle avait hâte de comprendre…
Il pleuvait de plus en plus fort et sa robe était mouillée.
Elle s’abrita sous les feuilles d’un arbre et attendit qu’Arceus termine ses expérimentations sur l’arbre.
Arasi entendit un orage éclaté, ils devaient se dépêcher de rentrer, le temps était mauvais.
La reine retint sa respiration quelques instants et essayait toujours de se rappeler de la légende.
Lyse… Lyse…

Après quelques sciures, l'objet devint accessible, peu à peu.
Fébrilement, l'ambassadeur le retira, en forçant un peu les parties de l'arbre qui coinçaient encore.

Une sorte de boîte métallique bien conservée fut retirée. Elle était relativement lourde, mais on pouvait sentir que, vu sa petite taille, ce n'était pas l'bjet qu'elle contenait qui pesait autant, mais plutôt les parois elles-mêmes. Sans doute un écrit, ou un bijou. Elle ne semblait pas verrouillé, et laissa le soin à Arasi de l'ouvrir, la boîte étant après tout un élément de l'histoire de sa famille.

Arasi, ... Prenez-la, elle vous revient. Allons l'ouvrir à l'abri, dans la bibliothèque, ce sera là que nous serons le plus proche de tout ce qui pourrait nous être utile.

Le vieil olivier avait rempli sa mission, il était maintenant fort délabré, mais il faisait maintenant partie de l'histoire de la famille d'Im... C'en était presque triste pour lui. Après un moment, Arceus se dirigea d'une traite vers le château, enjoignant la reine à le suivre.

La bibliothèque était spacieuse et un silence de mort y régnait.
Arasi s’installa à une table et caressa des doigts la petite boîte métallique.
Elle la secoua délicatement et lança un léger regard à Arceus.
Il devait être excité de découvrir le secret que contenait la boite.
Elle l’ouvrit. Il y eut un petit déclic, comme le passage secret qu’elle avait ouvert deux heures auparavant. A l’intérieur de la boite, il y avait un pendentif.
Il était léger, en métal et représentait une sorte de flèche pointant vers le ciel et entouré d’une fleur de lys. Arasi ne comprenait pas de quoi il s’agissait.
Elle le montra à Arceus qui n’avait pas voulu la déranger.
Arasi pensait connaître le symbole, elle l’avait déjà vu quelque part, mais elle ne se rappelait pas où…
Si Arasi avait trouver cette boite, cela devait signifier que Lyse ne l’avait pas trouvée, où que ce n’était pas la fin de l’aventure d’Arasi… Que ce pendentif devait mener ailleurs.

Je propose de consulter les livres d’histoires, ils sont là-bas au fond de la salle.
Vous me suivez ?

Arasi avança rapidement et des yeux, elle parcourait les différents ouvrages.
Elle pointa un livre doigt : « Symbole ancestraux ».

Peut-être que celui-ci nous aidera ?.

Elle en prit plusieurs autres et retourna jusqu’à la table pour consulter les précieux ouvrages.
Elle tournait les pages et s’arrêtait de temps à autres sur des passages intéressants mais sans rapport avec le pendentif.

Si tu as faim, demandes-moi quelque chose.

C’était la première fois qu’elle tutoyait Arceus et elle trouvait cela assez étrange, presque impoli. Mais son intention amicale.

Arasi se révélait astucieuse, et possédant pas mal de ressources...
Arceus se pencha au côtés de la monarque quand elle ouvrit la boîte, et admira quelques instants le pendentif. Il ne lui évoquait rien, sinon les fleurs de lys. Autant il avait été formé à enregistrer des centaines de symboles, autant celui-ci lui était mystérieux. Il demanderait éclaircissement au central des informations continentales.

Mais d'abord, il suivit la jeune femme chercher le livre approprié et la resuivit jusqu'à la table, parcourant tout comme elle le livre, plein d'informations, mais malheureusement étrangères à la fleur de lys.
Peu importe, ils continuèrent de chercher. Finalement, la souveraine s'adressa à lui. En le tutoyant. Mais sur un ton chaleureux, voire fraternel. Pas ce ton misérabiliste destiné à rabaisser la personne. Comme si l'aventure de percer le secret de Lyse avait fait tomber certaines limites... Mais devait-il lui aussi tutoyer, elle qui malgré tout restait sa supérieure ? Il ne savait pas du tout quoi faire... Pourtant, il devait répondre à sa question.

Non merci, je dois dire que le repas de la soirée m'a réellement coupé l'appétit pour un certain temps.

Ouf... C'était petit, mais au moins il n'avait pas eu à choisir.
En fait... Il n'appréciait pas cet équivoque, qu'il avait pourtant installé lui-même. Il fallait y couper.

Sire Arasi... Nous tutoyons-nous ?

Voilà, c'était direct... Mais franc, et au moins il serait rapidement fixé. Il ne savait trop comment agir, malgré toutes ses leçons de protocole Imien.
Arceus attendit.

Arasi réfléchit quelques instants.
Elle baissa légèrement sa tête avec un sourire chaleureux puis, d’une voix joviale annonça :

Oui.

Arasi continua de lire différents passages du livre mais elle ne vit rien de pertinent.
Quelques heures passèrent, les rayons de soleil commençaient à percer les tentures.
Arasi jugea bon de les ouvrir pour laisser passer la luminosité matinale.
Elle alla chercher d’autres ouvrages et se remit au travail.
Elle tomba sur quelque chose de passablement intéressant :

« Ce symbole a été découvert pour le première fois en l’an 100 de notre ère.
Il avait été dessiné sur une paroi rocheuse aux alentours des montagnes sèches entourant Im.
Nous ne savons pas grand-chose de ce symbole mis à part que la civilisation logeant dans les Montagnes sèches et qui aurait peut-être pu représenter ce dessin était adepte de l’immortalité, de la pureté de l’âme. »

C’était tout, il n’y avait rien d’autre…
Arasi montra le paragraphe à Arceus et attendit sa réponse…
Elle sentait que bientôt, ils s’en iraient.

Ils se tutoieraient donc, Arasi y avait consenti. Mais, pourtant, dans les heures qui suivirent, ils ne se parlèrent pas du tout. La reine poursuivit ses recherches dans les livres, tandis qu'Arceus alla contacter le réseau central de la bibliothèque du continent.

Centre fondé il y a des siècles par les différents royaumes de la région, dont Dorn et Im, il recensait les différents rapports d'espionnage et de secrets de toutes les zones. Le Dornien espérait grandement y découvrir quelque chose en rapport avec Lyse d'Im. Le préposé qui lui répondit, par communication magicophonique, le fit attendre quelques instants avant de lui répéter ce qu'il avait lu à l'entrée Lyse dans le recueil Imien de l'époque donnée.

Voilà ce que le recueil livre, voici un extrait de Im-Roy-XII, pages cent-cinquante six, et cent-cinquante sept.

Le roi Léonard eut à l'âge de quarante-cinq ans une fille illégitime, Lyse, dont le nom de famille reste inconnu. Dissimulée à tout prix aux yeux de la cour et du peuple, elle garda pourtant une affection secrète de son père, qui ne voulait qu'une chose, le bonheur de sa fille, quelle que soit son origine, chose qu'il n'eut jamais de son vivant, et la vie de sa fille restant inconnue, ayant comme disparu à jamais de la circulation depuis la mort de son père.

C'est tout ce que je peux vous dire pour l'instant, des recherches plus poussées donneraient peut-être plus de résultats.

Après ce monologue lointain, Arceus retourna aux côtés d'Arasi, qui lui montra un extrait du livre qu'elle tenait ouvert. Il n'avait rien à l'esprit en le lisant, il ne voyait pas ce que pouvait ressortir comme indice.
Il communiqua à la reine les nouvelles informations historiques, et attendit sa réaction.

Je ne sais pas où ceci nous mènera, dit Arasi.
Nous devrions aller jusqu’aux montagnes sèches pour vérifier ce symbole mais c’est extrêmement loin et de plus, personne n’y va jamais. Je ne pense pas que ce soit une bonne idée de s’y rendre. Il vaudrait mieux chercher ici, au château. Je suis certaine que Lyse a vécu ici quelque part.

Arasi referma les ouvrages et les replaça là où elle les avait pris.
Elle sortit de la bibliothèque pour rejoindre sa chambre, elle avait besoin de savoir pourquoi…
Elle avait besoin de comprendre…

Lyse était une enfant cachée, son père ne voulait probablement pas cela, il voulait la reconnaître.
C’est pour cela qu’il voulut lui offrir le présent de la famille…
Mais quel est-il ?
Est-ce un objet matériel, ou un présent spirituel ?
Je n’en sais rien, je ne sais pas où chercher.

Elle se doutait bien que l’ambassadeur ne saurait pas non plus où aller, mais elle espérait qu’il trouve une quelconque piste, n’importe quoi…
Il fallait d’abord qu’elle sache où elle avait vu ce symbole…
Sur un mur ? Sur une sculpture ?
Arasi soupira. Elle laissa Arceus sur le palier et lui dit :

J’ai besoin de réfléchir, je vous donne rendez-vous dans deux heures ici même.

Arasi referma la porte de son appartement avec un léger sourire puis se laissa tomber dans un fauteuil, elle referma ses paupières et fredonna un air de musique.
Elle se laissa soudain entraîner par le sommeil et entra dans le monde des rêves…

Arasi qui allait dormir, ce stop dans l'investigation, avait coupé Arceus dans son élan, et décida donc de lui aussi se laisser dormir quelques temps, se concentrant avant de s'assoupir pour se réveiller deux heures plus tard.

Il dormit d'une traite dans la bibliothèque, mais se réveilla un tantinet plus tôt que prévu, et en profita pour relire les extraits du livre choisis d'Arasi. La fleur de Lys, mh... Ce ne seraient plus les livres qui le renseigneraient, tout avait déjà été recherché, désormais. Dans son esprit, une autre pièce lui fournirait les éclaircissements: la salle des armoiries.

La grande pièce, austère, semblait destinée à imposer le respect à ses visiteurs, décorée d'armures, de tableaux, et d'armoiries, évidemment. Il ne fut pas long avant de trouver le blason comportant une fleur de lys, et lut la légende.

Bon sang !

Arceus était stupéfait, jamais il n'aurait pensé qu'il y avait un rapport entre Lyse et la lignée indiquée sous le blason... Il courut vers la porte du domaine d'Arasi, et frappa sans ménagement.

Arasi ! J'ai trouvé la signification de la fleur de Lys, le blason à la fleur de Lys, c'est celui de se descendance, et c'est...

Mais il n'eut pas le temps de finir sa phrase, retenu par la force de l'émotion. De toute façon, Arasi ne serait pas longue à émerger de la pièce toujours close.

Le blason de ma famille, ponctua Arasi au travers de sa porte.
Elle ouvrit celle-ci et regarda Arceus...
Elle commençait à comprendre et imaginait des centaines de possibilités.
Pourtant, elle ne se sentait pas heureuse de toucher à la vérité, elle présentait de mauvais présages.

Comment l’as-tu découvert ? Tu es allé dans la salle des Armoiries ?
Bien vu.

Arasi sortit dans le couloir, elle avait enfilé une robe d’hiver car elle avait très froid.
Elle conduisit Arceus dans son boudoir personnel et y fit servir du thé.
Lorsque que deux tasses furent pleine et que les domestiques eurent refermer la porte, Arasi commença à parler :

Donc, si je comprends bien, cette fleur de Lys représente la descendance de Lyse ?
Mais lyse n’est pas la fille légitime de roi Léonard…
Aurait-on dessiné un blason particulier pour elle ? Ce serait ridicule n’est-ce pas ?
Je ne suis pas sûre de comprendre.

Le thé et l'aurore naissante rendaient particulièrement agréble cette discussion, sans parler du mystère en jeu. Mais les questions d'Arasi étaient fort pertinentes, pourquoi Lyse aurait-elle eu son propre blason ? Il ne voyait pas beaucoup de solutions.

Arasi, pour être honnête, je ne vois que quelques possibilités.

Il est possible que cette Lyse ait été faite première noble d'une nouvelle lignée, et qu'elle se soit mariée avec un prince d'Im, ce qui voudrait dire qu'elle a épousé un demi-frère, en changeant son nom.

Ensuite, une autre éventualité est que Lyse ait changé de nom officiel et e soit faite adopter par Léonard, en tant que noble d'une lointaine lignée, dont le blason aurait été prétendument la fleur de Lys.

Ou bien, Lyse est restée cachée, et pour une raison, par exemple une absence d'héritier, Léonard a été contraint de céder la couronne à sa fille, soi-disant descendant d'une autre famille noble avec laquelle le roi aurait tout planifié.

Bref, nous n'en savons trop rien.

En tout cas, il est extrêmement probable que Lyse soit revenue dans la famille royale, officiellement en tant que nouvelle arrivante, cependant.
Et donc, si le blason est resté jusqu'à nos jours, cela signifie, que ceux qui le possèdent sont... ses descendants.

Arceus regarda soudainement Arasi, pour la première fois avec surprise. Si son hypothèse s'évérait, elle serait désormais pour elle-même en partie non-royale. Il en éprouvait presque de la compassion. Evidemment, les preuves manquaient, mais dans son esprit, tout s'alignait désormais clairement.

Arasi respirait lentement. Elle écoutait ce que disait Arceus, ses paroles étaient vraies, elle en était convaincue.

Je… Je crois savoir ce qu’il s’est passé, Lyse était bien la fille de Léonard, j’en suis convaincue et le fils de Léonard a régné lui aussi.
Il y avait bel et bien un héritier.
Donc, Lyse a soit épousé son demi-frère, soit, elle s’est fait adopté par son véritable père.
Je me demande ce que la reine a du penser, dans les deux cas.
Du moins, si elle savait la vérité ?

Arasi voulait en savoir plus, elle ne savait pas très bien ce qu’il convenait de faire.

D’après toi, serait-il possible qu’elle eut une liaison avec son propre frère ? Ce serait tellement étrange, tellement sale.
Je ne trouve pas cela sain, tu me comprends ?

Arasi laisser échapper son calme... D'ordinaire si posée, elle devenait chaotique.

Je sais bien, qu'elle se soit liée avec son frère d'un amour conjugal... Est difficilement acceptable dans une famille royale. Mais après tout, ce n'était au pire que son demi-frère, et... Comment être sûr de la moindre chose ? Le roi et sa descendance ont dû interdire l'histoire d'être consignée.

Tu sais, même si l'inceste est venu troubler la généalogie de la lignée, c'était il y a si longtemps que l'incidence naturelle a dû disparaître depuis longtemps. Mais ton honneur et celui de Loweleï s'en trouvent chamboulés... Si tu désires savoir si elle a réellement épousé son demi-frère, vérifie les registres royaux de naissances, si Léonard a inventé une famille à Lyse, il n'a pas pu créer une infinité d'ancêtres, donc la piste devrait s'évanouir à un certain degré dans leur famille.

Dans la chapelle du château, l'honneur de ta famille est conservé depuis des siècles... Est-ce que tu veux ouvrir la boîte de Pandore ?

La tension montait, et les enjeux moraux étaient de taille. Arceus ne savait pas jusqu'où Arasi pouvait aller dans le passé, et il était fort possible qu'elle se fasse plus de mal que de bien.

Je suis prête, je crois que l’on me cache des choses depuis trop longtemps.

Arasi se rendit à la chapelle donc.
Elle avait le cœur lourd d’émotion… Si Lyse avait effectivement épousé son demi-frère… L’avait-elle véritablement aimé ? L’avait-elle épousé de force à cause de Léonard ?
Savait-elle seulement qu’elle était la fille illégitime de Léonard ?
Toutes ces questions risquaient de rester sans réponses… Hélas !

Je me demande si Lyse a pu être heureuse…

Lorsqu’elle arriva à la chapelle, Arasi se rua sur les registres avec beaucoup d’adresse pour ne pas renverser statuettes et reliques.
Elle remonta son doigt très haut dans le registre, à la quatrième génération recensée des Dénéa. Léonard Dénéa fils de de Blanor Dénéa et d’Ygerne de Morcade.

Regarde, ici, on voit que Léonard était marié à Yseut et qu’ils ont eu un fils.
La légende disait vrai.
Il s’appelle…

Arasi épousseta le registre pour découvrir le prénom de son ancêtre : Sadoc…

Il s’appelait Sadoc.

Un petit fil doré le reliait à un nom de jeune fille : Léone d’Astoltat.

Léone, c’est un peu comme le diminutif de Léonard, tu crois que c’est un signe ?

Arceus avait suivi le pas rapide de la rein jusqu'à la chapelle, étrangement baignée de lumières colorées dues aux vitraux. Arasi se jeta littéralement à la découverte de la généalogie des Dénéa, et trouva rapidement un extrait intéressant, puis le lui montra. Sadoc et Léone. Sadoc et Lyse ?

Je ne sais pas... Ca aurait été risqué pour Léonard de jouer à ça. Mais si les Astoltat étaient nobles, ils ont dû être recensés au château également. Donc, en regardant si une ascendance crédible existe pour cette Léone, nous serons fixés...

Arceus prit délicatement le registre des mains d'Arasi et trouva en quelques instants la page Astoltat. Il lut, ému d'enfin découvrir la vérité. Sa voix tremblait un peu, mais il était quand même calme et déterminé.

Léone d'Astoltat, mariée à Sadoc Dénéa en telle année.
Née de Nucuos d'Astoltat et de Lan Eventue.
Nucuos d'Astoltat, né de Codner d'Astoltat et Sophitia Fommini.
...

...

Ca s'arrête là, en plus des parents de la mère de Léone. On dirait bien qu'une lignée imaginaire a été créée pour éviter les risques de petits curieux. Mais Léonard et ses contemporains n'avaient pas pensé qu'un jours les curieux seraient des membres de la famille royale, qui auraient donc accès aux registres du château...

Oh... Arasi. Je suis désolé, je me suis laissé emporter par la fougue, alors que pour vous une façade s'écroule.

Il venait de se rendre compte qu'il n'éprouvait rien au-delà de la curiosité, contrairement à la reine, qui devait sûrement avoir le souffle coupé et craindre pour la pureté de son sang... Il décida de ne rien ajouter, et d'attendre la réaction de la maîtresse des lieux.

C’est une erreur, il doit y avoir une erreur…
Lyse n’a as pu épouser son frère, c’est monstrueux, c’est inhumain, comment Léonard a-t-il pu demander cela ?
C’est…

Arasi souriait… Elle venait de se rappeler des paroles de sa mère.
C’était lors d’une nuit d’hiver, Arasi était malade et n’arrivait pas à s’endormir, comme à son habitude.
Sa mère était venue à son chevet :

Tu sais Arasi, ta grand-mère m'a un jour dit quelque chose : l’amour excuse les erreurs.

Arasi ferma ses paupières pour se rappeler et récita les phrases qu’elle avait apprise par cœur une dizaine d’années auparavant :

L’amour excuse les erreurs, parfois, même si on sait que le chemin que nous prenons est dangereux, il est difficile d’y résister et parfois, il est sage de se laisser tenter.

Elle se rappelait de tout, tout était éclairci, Lyse avait épousé Sadoc ; son frère mais pas de force, par choix, car elle en était tombée amoureuse…

Arceus, Léonard… Je sais maintenant.

Elle jugea bon de lui laisser demander ce qu’elle savait.

La reine d'Im semblait vivre une de ces révélations intérieures... Comme si au lieu d'acquérir la vérité, elle l'avait toujours eue en elle sans la remarquer avant.

Finalement, toute cette histoire semblait trouver une fin heureuse, avec une Arasi rayonnante, comme si l'équilibre venait après des siècle d'être rétabli. La citation qu'elle avait aux lèvres était si vraie, Arceus n'osait troubler ce moment qu'elle vivait avec son passé. Le moment difficile était passé, enfin.

Quand la Dénéa rouvrit les yeux, elle le regarda et lui dit qu'elle savait.

Qu'est-ce que tu sais ?

Finit-il par dire, avec une intonation pareille à celle que l'on a lors du calme après la tempête, mêlée de contemplation.

Arasi souri… Elle se rappelait de tout à présent.

Lyse a vécu dans le château toute son enfance, avec sa mère qui travaillait comme domestique. Léonard a d’ailleurs poursuivit sa relation avec elle.
Il n’a eu de cesse de l’aimer, il aurait voulu en faire sa reine mais les mœurs ont détruits tout espoir de fonder une famille… Il n’a jamais avoué son lien de parenté avec Lyse.
Pour la protéger… mais je pense que ce serait de l’égoïsme plutôt.

Arasi marqua une légère pose, elle était ravie d’avoir retrouvé le fil de l’histoire, elle sembla épanouie… Comme si elle détenait le savoir…

Lyse devait sans doute jouer dans le château et forcément, un jour, elle a du tomber sur Sadoc… Ma mère m’a dit qu’à la base, ils se haïssaient, ils étaient ennemis…
Mais durant leur adolescence, ils sont tombés amoureux… Cela me semble logique.
Tu imagines la suite ? Sadoc annonçant ses fiançailles avec lyse…
Ce devait être une catastrophe pour Léonard !

Arasi attendait la réaction d’Arceus, tout en se disant qu’elle aurait aimé vivre une passion aussi forte que Lyse éprouvait pour Sadoc.

Sadoc et Lyse étaient fou l’un de l’autre et Léonard tenta de les séparer, en envoyant son fils si chéri au front.
Sans succès… Celui-ci revint très vite.
Je pense qu’au final, Léonard a avoué son secret à Lyse.
Au seuil de la mort…
Et elle a pu vivre une histoire d’amour avec Sadoc. Ils se sont mariés en connaissance de causes. L’amour devait être fort entre eux…
Ils étaient chanceux.
Voilà, je crois qu’il n’y a plus rien à ajouter.

Arasi s’assis sur un siège tout en serrant le médaillon contre son cœur, elle espérait peut-être que celui-ci lui transmettrait un peu d’espoir.
Bientôt viendrait l’heure de son mariage et Arasi ne tenait personne dans son cœur.
Elle en mourrait de honte. S’il n’y avait pas d’héritier au trône, la longue descendance des Dénéa s’achèverait.
Peut-être que cela valait mieux pour tout le monde…
La perspective de finir sa vie toute seule assombrissait les pensées d’Arasi.
Mais si choisir un époux n’était pas si difficile, choisir un roi, réduisait les possibilités…

Arasi et fixa Arceus de ses grands yeux bleus.

Tu t’es marié ?